KIKOU,NOTRE HISTOIRE AVEC LES DEUX BOSSUS SE TERMINE.
JE SOUHAITE QUE CELA VOUS AURA PLUS .ET SI DANS LA FORÊT VOUS EN RENCONTREZ UN!.....RAPPELLEZ-VOUS L'HISTOIRE.
L'autre bossu, en le voyant ne pouvait en croire ses yeux. Il interrogea Thomas qui lui raconta les événements de la nuit.
"Oh! c'est si facile, pensa l'autre bossu, nommé Piezrre. Eh bien! je me ferai débarrasser de ma bosse. J'irai ce soir à Albert et moi aussi je reviendrai la nuit."
Vers le soir Pierre le Bossu prit un bâton et s'en alla à Albert chez un de mes amis qui le retint assez tard. C'était du reste ce que désirait le paysan. Comme Thomas, il n'était guère rassuré à s'aventurer ainsi seul la nuit par la campagne
A chaque buisson d'épines ou de ronces qui se trouvait sur le talus bordant la route,il croyait trouver embusqué quelque brigand ou quelque voleur qui lui ferai un mauvais parti; le moindre bruit le faisait frissonner et s'arrêter tout court. Il essaya de chanter; sa peur ne fit que s'accroître; à tout instant, il lui semblait entendre des voix qui, dans le lointain répondaient à la sienne, des voix de bandits,bien entendu, et ses cheveux se dressaient sur la tête. Et pourtant il lui fallait chanter s'il voulait attirer l'attention des lutins...
Pierre le Bossu continua donc à chanter d'une voix peu assurée, et en s'interrompant cent fois pour moins, la chanson plus gaie qu'il avait pu trouver parmi celles à lui connues, "la Chanson des Hussards qui se fond servir dans une hôtellerie.
Deux poulets rôtis
Trois pigeons en graisse,
et ce, sans bourse délier. Quand il eu fini, il la recommença, pour la redire un peu plus tard à nouveau. Il arriva ainsi à la sortie du bois de Mailly sans avoir rencontré âme qui vive.
Mais depuis une heure, et sans qu'il s'en doutât, une troupe de goblins, aussi laids que ceux de la veille étaient beaux, le suivaient en écoutant la Chanson des Hussards.
Notre bossu la répétait pour la septième fois au moins; aussi les petits hommes n'y tenant plus partirent d'un éclat de rire formidable qu'on eût pu entendre à une lieue de là. Pierre le Bossu se retourna tout effrayé, mais voyant que les rieurs étaient des lutins, le courage lui revint et il attendit ces derniers assez bravement. Sans dire une parole, celui qui paraissait être le chef des goblins s'approcha du bossu, le prit par la main et l'entraîna dans la prairie. Puis il s'assit sur la borne: des lutins se placèrent aux quatre coins du champs, commencèrent l'air d'une ronde, et la danse commença. Les petits êtres dansaient à coeur joie, entraînant dans leur course folle le pauvre bossu qui bientôt se trouva tout essoufflé et déclara qu'il n'en pouvait plus.
-C'est bien,alors; nous allons déjeuner ici et nous t'inviterons à prendre part à notre festin, si le coeur t'en dit. Et le chef des lutins fit servir un repas tel que celui de la veille; puis on fit le cercle autour de Pierre le Bossu et chacun fit honneur aux mets aussi abondants que délicieux qui se trouvaient servis sur l'herbe. Malheureusement le petit bossu avait trop bien soupé à Albert; il ne put se tirer du festin avec honneur et le vin capiteux des goblins ne tarda pas,en lui dérangeant la cervelle, à lui brouiller complètement les idées. Bientôt le roi des lutins se leva:
-Mon ami, nous avons fort bien dansé tout à l'heure; il nous faut maintenant faire quelques rondes en nous accompagnant du chant des goblins. Nous comptons sur toi. Pierre le Bossu.
-Comment donc? Mais parbleu! je suis des vôtres, à la vie à la mort! Je suis prêt à danser, à chanter, à faire tout ce qu'il vous plaira de me commander.
Tout heureux du bon vouloir du petit bossu, les goblins se prirent par la main, formèrent un grand cercle et, entraînant Pierre avec eux, se livrèrent à une ronde inconnue des hommes.A Chaque tour, les lutins s'arrêtaient et chantaient
Dimanche, Lundi,
Mardi, Mercredi,
Jeudi, Vendredi,
Semaine finie.
"Décidément, se dit le bossu, ces lutin ont une singulière façon de compter les jours de la semaine. Il manque bien des jours à leur calendrier. Mais il me faudrait trouver les jours qu'ils oublient. Cherchons bien".
Et Pierre chercha; mais il eut beau se mettre l'esprit à la torture pour trouver les jours manquants, il ne put y parvenir.
" Peut- être, se dit-il, qu'en chantant avec eux, les autrs jours me reviendront à l'esprit."
Et il se mit à chanter:
Dimanche,Lundi,
Vendredi,Jeudi,
Semaine finie.
Mardi,Jeudi,
Dimanche,Mercredi.
Troublé par le vin et la danse, il entremêlait les noms des jours de la semaine dans le plus grand désordre.
Les petits êtres poussèrent des cris de rage et voulurent faire un mauvais parti au pauvre bossu.
Leur chef les contint, fit cesser la ronde et dit à Pierre le Bossu.
-Lors de la lutte des bons et des mauvais ange, il arriva que certains lutin ne voulurent prendre parti ni pour les uns ni pour les autres; et pendant que la guerre était forte ardente dans le ciel, ils continuèrent tranquillement leur genre de vie, courant de tous côtés à la recherche d'aventures ou bien chassant les cerfs ou autres animaux des forêts. Mais quand le démon eut été vaincu par les bon anges, le Seigneur nous condanna à errer sur la terre jusqu'à ce qu'un être humain vînt nous délivrer en terminant notre refrain des jours de la semaine, car nous ne sommes de ces lutins. Chaque année, à pareil jour, nous épions les voyageurs des environs et nous les invitons à danser et à chanter avec nous. Personne n'a pu encore finir notre refrain, tandis qu'une autre troupe de goblins, nos frères, a été sauvée hier par un petit bossu qui passait sur cette route. Quand à toi, tu as tellement mêlé les jours de la semaine dans ta chanson que nous ne pourrons en retrouver la place de mille ans d'ici pour le moins. Tu recevras la juste punition des malheurs que tu nous attires. Dabord nous allons te faire un cadeau qui va bien nous divertir. Le chef des lutins fit un signe et deux goblins apportèrent une belle boîte d'argent ciselé qu'ils déposerènt aux pieds du roi.
Le chef des lutins fit un signe et deux goblins apportèrent une belle boîte d'argent ciselé qu'ils déposèrent aux pieds du roi.
"Si c'est ainsi qu'ils pensent me punir, se dit Pierre, les petits hommes se trompent fort; je les remercie beaucoup de m'offrir un pareil bijou."
Mais sa joie fut de courte durée, car le lutin, se baissant, ouvrit la boîte et en tira... la bosse enlévée à Thomas! Le pauvre bossu voulut s'enfuir, mais deux goblins le saisirent le lièrent en un tour de main et le couchèrent sur le sol après l'avoir déshabillé, Les petits êtres ne se sentaient plus de joie: ils battaient des mains, sautaient et trépignaient d'aise pendant que leur chef plaçait la bosse de Thomas sur la poitrine de Pierre; ceci fait, on détacha le pauvre bossu à demi-mort de terreur et de honte. Il est certain qu'auparavent ni après, on ne vit jamais un bossu plus difforme que Pierre à la suite de cette scène.
-Ce n'est pas tout, l'ami, lui dit le goblin, tu vas danser avec nous jusqu'au lever du soleil; nous voulons qu'on te voie rentrer à la ferme emportant tes deux bosses. Allons,recommençons la ronde!
Et deux des lutins les plus agiles saisirent le bossu par la main et l'entraînèrent dans une ronde vertigineuse. Les lutins faisaient cette fois des sauts de soixante pieds, et Pierre, entraîné par ses compagnons, devait répéter ces mêmes prodiges. Bientôt cette course folle lui devint un supplice intolérable. Il demanda grâce aux goblins: il cria, il pleura, il s'emporta, il implora; mais les petits êtres n'en sautaient que plus fort et plus haut et la danse continuait plus furieuse que jamais.
Ceci dura jusqu'au lever du soleil. Dès que l'astre se montra sur le point de paraître, les lutins s'arrêtèrent, se consultèrent un instant et disparurent en riant et en chantant dans le bois de Mailly.
Le pauvre Pierre était resté éntendu sans mouvement sur l'herbe de la prairie.
Ce ne fut que quelques heures après que les paysans à sa recherche le trouvèrent à demi-mort dans la prairie, dont l'herbe était toute foulée par les lutins.
Des soins lui furent prodigués et qulques mois plus tard il pu reprendre son travail à la ferme. Inutile de dire que jamais depuis ce temps il ne s'avisa de se promener la nuit sur la route d'Albert pour se mêler aux rondes des goblins.
Il en avait assez de ses deux bosses. on le connut plus à Acheux et aux environs que sous le nom de Pierre Dossu-Bossu.
Quand à son compagnon, grâce aux présents des lutins, il vécut fort heureux avec la fille du fermier qui s'était prise à l'aimer quand elle l'avait vu débar assé de sa bosse.
Conté en 1878 par Alfred Haboury, d'Acheux ( Somme)
E. Henry Carnoy. Littérature orale de la Picardie
Paris. Maisonneuve et Cie 1883
Et voilà
bon mercredi pour les enfants et bonne journée a tous.